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CHAPITRE III — LE RÉFORMISME Si

disent, les prolétaires n'acceptent de s'affranchir du patronat que si on les y contraint.

Au fond, le prolétariat n'en veut qu'aux abus du patronat, qui sont le plus souvent déterminés par les abus plus graves de l'agiotage financier et de la malfaisance politicienne. S'il souffre réellement de son état, il souffrirait bien plus d'en sortir.

Il souffre surtout d'être dans le désordre, sans force pour ordonner et sans lien qui le rattache à ce qui dure.

Le bien-être est appréciable^ certes. Il n'a jamais- été si répandu. L'industrie mieux réglée pourra l'accroître encore, pour tous. Ce n'est pas le mal- être matériel qui fait la tristesse de ce temps.

On manque de vie sociale, et on en manque parce que la société, dissoute, n'exalte plus aucun des sen- timents convergents. Et c'est le prolétariat, naturel- lement affectif, qui ressent le plus vivement l'an- goisse du vide d'une existence sans but, et donc sans devoir certain, et donc sans joie humaine.

La (( paye » est devenue le seul mobile de ses efforts, et voilà pourquoi le travail lui paraît un esclavage et le salaire un avilissement.

Il faut aider la classe ouvrière à se reconstituer socialement, — non l'affaiblir, non la dissoudre. iPlus elle sera forte et consciente, mieux elle s'in- jCorporera à la société.

Allié aux femmes et aux philosophes, c'est-à-dire unissant son énergie au sentiment et à la pensée, le prolétariat saura imposer aux patrons et aux capita- listes les devoirs de leur fonction sans énerver leur

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