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CHAPITRE V — LE POUVOIR SPIRITUEL 369

positif, on le connaît : c'est « rassujettissement de tous les phénomènes quelconques à des relations inva- riables ». De Fadmettre et de s'y conformer, nous prions qu'on nous dise en quoi la liberté de penser est restreinte? Elle en est grandie, au contraire, puisqu'elle est fortifiée ainsi. De même, ce qu'on nomme « l'amour libre » n'est ni de l'amour humain ni de la liberté. 11 convient mieux à des sauvages, asservis à toutes les nécessités immédiates, aux étroites possibilités, d'errer peureusement à tra- vers la brousse et la jungle : une belle route, sûre, aplanie, droite, est une conquête de la civilisation, une liberté certaine, celle de circuler en sécurité et d'atteindre l'étape. Elle a pourtant sa police et elle nous trace une ligne de marche.

Déraisonner n'est pas librement penser, puisque ce n'est pas penser, — non plus que voler ou tuer sont de la liberté sociale, puisque c'est contre toute socialité. « Le dogmatisme, nous dit Comte, est l'état normal de l'intelligence humaine, celui vers lequel elle tend par sa nature, continuellement et dans tous les genres, même quand elle semble s'en écarter le plus. Car le scepticisme n'est qu'un état de crise... Les peuples modernes ont obéi à cette impérieuse loi de notre nature, jusque dans leur période révolu- tionnaire, puisque toutes les fois qu'il a fallu réelle- ment agir, même seulement pour détruire, ils ont été conduits inévitablement à donner une forme dogma- tique à des idées purement critiques par leur es- sence. Ni l'homme, ni l'espèce humaine ne sont des- tinés à consumer leur vie dans une activité stérile-

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