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338 TROISIÈME PARTIE — LA CRISE MORALE

n'existe en Occident que treize poètes véritablement grands, deux anciens, onze modernes, y compris même trois écrivains en prose. Parmi tous les autres, on n'en citerait pas plus de sept dont la lecture puisse ou doive devenir journalière. Quant au reste, on le détruira sans doute presque entièrement, comme aussi nuisible à Tesprit qu'au cœur, lorsque Téducation régénérée aura permis d'en extraire tous les documents utiles, surtout historiques ».

Évidemment, Auguste Comte eût jugé sévèrement le Salon des poètes, et tout notre prurit littéraire.

Mais le fondateur du positivisme, est-ce que ça compte pour notre jeunesse aussi dépourvue de vé- nération que de modestie? Chacun a son système. On institue des « écoles » qui durent le temps de boire quelques bocks et d'introniser des « maîtres » qui sortent du lycée. « Chacun tendant à se former, dit A. Comte, par ses seules forces, un système d'idées générales, sans remplir aucune des conditions indispensables .pour cela, il est devenu peu à peu rigoureusement impossible, dans les masses, d'ob- tenir, entre deux esprits seulement, un accord réel et durable sur aucune question sociale, même très simple. Si cette anarchie pouvait se borner à ce qu'elle a de ridicule, le mal serait sans importance, et la satire suffirait pour le réduire dans les limitesî convenables. Mais la facilité qui en résulte de con- cevoir comme à peu près également plausibles le pour et le contre sur la plupart des points dont la fixité importe si éminemment au bon ordre, produit des effets d'une tout autre gravité ».