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298 TROISIÈME PARTIE — LA CRISE MORALE

le péril. Si, en 1900, on comptait, pour 100 affaires, 126 accusés, en 1905, on en compte 147 )>.

De plus, cette augmentation de la criminalité va avec Ténervement croissant de la répression et Tin- suffisance croissante de la police. La Cour d'assises de la Seine, sur 215- prévenus qu'elle avait à juger du l^"" janvier au 15 mars 1908, a prononcé 89 ac- quittements et 20 condamnations avec sursis, soit plus de 50 0/0 de mises en liberté immédiate. Évi- demment, les travailleurs honnêtes risquent plus que les apaches.

FauL-il croire que les jurés de la Seine sont des philosophes de bonté qui pardonnent tout parce qu'ils comprennent tout? Non pas. Ils acquittent par indifférence, parce qu'ils ne distinguent plus Tacte bon socialement de Tacte mauvais, parce qu'il n'y a plus en fait de société. L'anarchie intellectuelle et morale s'étend. Une société qui en est à se demander si elle se peut défendre est déjà condamnée.

En 1890, la proportion des affaires « classées », c'est-à-dire celles dont on renonce à découvrir les auteurs, était de 63 0/0 ; actuellement, elle atteint 71 0/0. On peut donc dire que 15 0/0 seulement des infractions, délits et crimes sont punis.

Le plus inquiétant, c'est l'accroissement de la cri- minalité juvénile qui a été de 450 0/0 en 75 ans. Elle est plus considérable pour les crimes que pour les délits, et surtout pour les meurtres et assassinats. En 1830, on comptait 6,979 mineurs délinquants de 16 à 21 ans; en 1850, 13,910 ; en 1880, 23,319 ; en 1890, 27,309; en 1900, 30,485; en 1905, 31,441.