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UNE DIRECTION : LE POSITIVISME 77

voulant abstraire le psychique du vital, du social ou du moral, on arrache ses racines, on le dénature. « L'esprit est devenu le sujet à peu près exclusif des spéculations, dit-il; les facultés affectives ont été presque entièrement négligées et subordonnées à l'intelligence. » Et c'est « l'inverse de la réalité ». Il ajoute : « L'expérience montre que les affections, les penchants, les passions constituent les princi- paux mobiles de la vie humaine. Il est même cer- tain que les penchants les moins nobles, les plus animaux, sont habituellement les plus énergiques et, par suite, les plus influents. » On reconnaîtra ici, et épars dans l'œuvre entière, l'essentiel de quelques théories récentes et célèbres, notamment la psycho- physiologie de Wundt et T. Ribot, la psychosocio- logie de Tarde et Roberty (1), la psychanalyse de Freud, voire l'intuitionnisme.

A. Fouillée reconnaît que « A. Comte lui-même, tout en attaquant (?) la psychologie, lui a rendu maint service ». Et d'abord, précisément, celui de ne pas la tronquer.

Comte est un profond psychologue. Son tableau cérébral suffirait à en témoigner. Ce tableau répartit en trois groupes les fonctions cérébrales élémen- taires : cœur, esprit et caractère : « le cœur pousse, l'esprit éclaire, le caractère réalise ». Le cœur com- prend les penchants ou sentiments qui sont : i° per-

(1) Victime du bolchevisme avant la lettre, E. de Roberty a été assassiné dans ses terres, en Russie, au début de la guerre. C'était un esprit alerte et vigoureux. Mais son hy- perpositivisme verse trop souvent dans une fumeuse mys- tagogie. Il y a danger, même pour les plus fortes intelli- gences généralisatrices, à vouloir dépasser Comte.