Il me raconta ensuite qu’il avait surpris une conversation entre les trois bandits, que ses compagnons n’avaient pu comprendre parce qu’ils parlaient dans la langue iroquoise à laquelle ceux-ci étaient étrangers.
Bien qu’il n’eût pu saisir qu’imparfaitement ce qu’ils se disaient, il avait vu qu’il s’agissait d’un projet d’enlèvement ; mais que l’entreprise qu’ils se proposaient devait être entourée de grands périls, car c’est à qui des trois ne l’exécuterait pas. Après avoir longtemps délibéré il fut facile à Baptiste de conclure, par les mots qu’il pouvait entendre quoiqu’ils ne fissent que des phrases décousues qu’ils étaient décidés de mettre leur projet à exécution le plus tôt possible. Ils étaient poussés par l’espoir d’une rançon que le chef paierait pour délivrer son enfant d’adoption.
On peut concevoir l’impression que me fit cette révélation. C’était à n’en pas douter mon Adala qu’ils voulaient me ravir ; peut-être même étaient-ils déjà en marche. Ils avaient néanmoins compté sans leur hôte et, malheureusement pour eux, la partie était trop forte, ils ne devaient pas en recueillir le gain.
Nous concertâmes nos plans de défense, Baptiste et ses deux amis devaient surveiller toutes les démarches des brigands et m’avertir quand ils les verraient tenter quelque chose de suspect. La surveillance de Baptiste méritait considération surtout lorsqu’il était guidé par la reconnaissance comme dans cette occasion ; ses compagnons par amitié pour lui s’étaient liés de tout cœur à moi et me juraient fidélité. Ils étaient guidés par l’esprit des aventures d’abord, puis par le courage que met tout honnête homme à prévenir un crime et en prévenir ceux qui devaient en être les auteurs. C’était pour eux un stimulant plus que suffisant. Comptant donc sur ces auxiliaires, je pris le chemin de ma demeure bien décidé à verser jusqu’à la dernière goutte de mon sang pour défendre mes protégées.
En arrivant dans le village, j’informai les habitants que j’étais sur les traces de ceux qui avaient jeté la consternation parmi eux. Je leur fis connaître la tentative qu’ils devaient faire pour enlever Adala. Il n’y eut qu’un cri d’indignation parmi ces braves gens ; tous s’offrirent de me prêter main forte et nous nous séparâmes après avoir convenu de faire bonne garde et de donner l’éveil dans le cas où un des trois misérables serait aperçu rôdant dans les environs.
Quinze jours se passèrent dans une parfaite tranquillité et sans que j’eusse de renseignements sur mes nouveaux alliés. Je connaissais trop la perspicacité et le dévouement de Baptiste pour