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HÉLIKA.

J’allai ensuite faire mes adieux à Monsieur Odillon. Il n’était pas encore remis des secousses qu’il avait éprouvées. Il put cependant trouver quelques paroles de consolation et d’encouragement, et ce fut avec la plus grande émotion que nous nous séparâmes.


CHAPITRE XVIII

angeline.


La voie qui me restait à suivre était désormais toute tracée. Réparer le mal que j’avais fait, tel était mon devoir et la détermination que j’avais prise. Je suis heureux aujourd’hui du témoignage de ma conscience qui me dit que je n’ai pas forfait à mon serment.

Il me fallait aller rejoindre Angeline. L’affreux malheur qui était venu fondre sur elle me l’avait rendue encore plus chère, s’il était possible, car à l’amour paternel que je lui portais rejoignait un sentiment d’incommensurable pitié.

Je passai le reste de la journée à acheter des provisions en abondance ainsi que des étoffes et des vêtements de toutes sortes. Le lendemain matin, accompagné de quatre hommes vigoureux que j’avais choisis et engagés, je me dirigeai vers le Lac St. Jean où je devais la rencontrer. Nous marchâmes pendant quatre jours et quatre nuits sans prendre que justement le temps nécessaire pour les repas et le repos qui nous étaient indispensables, j’avais hâte d’arriver et pourtant je redoutais le moment où elle me demanderait des nouvelles d’Attenousse, car je savais que ce serait la première question que sa mère et elle me poseraient.

La quatrième nuit, du haut d’une éminence, par un beau clair de lune, je pus contempler le campement d’une partie de la tribu qui reposait paisiblement sur les bords du lac. Je voyais la fumée qui s’échappait de chaque toit et s’élevait en ondoyant pour se perdre dans l’immensité des cieux.

Je pressai alors ma poitrine à deux mains pour arrêter les palpitations de mon cœur qui semblait prêt à en sortir. Un des indiens qui m’accompagnaient me désigna la demeure d’Angeline. Je sentais en descendant la pente qui y conduisait mes jambes faiblir sous moi. Les chiens de garde poussaient des hurlements inquiets et plaintifs pour avertir leurs maîtres que des étrangers arrivaient, j’avançais toujours malgré la certitude où j’étais que j’allais porter le désespoir dans cet intérieur. Quelques sauvages sortirent pour se rendre compte de ce bruit insolite. Presque tous me reconnu-