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HÉLIKA.

avec une gratitude infinie l’assurance que je lui donnai que je travaillerais toujours, au retour de notre expédition, à la rendre heureuse. Je la confiai aux mains de la vieille indienne qui nous avait déjà sauvé la vie et qui depuis deux jours était arrivée je ne savais d’où dans notre camp. Son fils Attenousse, car c’était bien lui qui était le porteur du message du Gouverneur, était reparti la veille de notre départ pour aller prendre le commandement d’une tribu montagnaise dont il était le chef.

Je remis de plus à la vieille des papiers importants qu’elle transmettrait à un missionnaire que je lui avais désigné et qui devait bientôt revenir, laissant une procuration à ce dernier et l’autorisait à retirer les fonds nécessaires afin de pourvoir amplement à la subsistance d’Angeline et de celle qui en prendrait soin. Mes fonds étaient déposés, comme la chose se faisait alors, dans le Trésor Royal, et reçus en bonne forme m’en avaient été donnés. Toutes ces dispositions prises, j’étais tranquille sur le sort d’Angeline, c’était d’ailleurs un commencement de réparation qui lui était dû, ainsi qu’à ses parents dont j’avais été le persécuteur et le bourreau.

Cet homme de bien auquel j’avais confié l’exécution de mes dernières volontés en partant, ce bon prêtre, dont la charité et les bonnes œuvres étaient sans bornes s’appelait monsieur Odillon. Il me représentait l’ancien curé de ma paroisse si bon et si vénérable. Dans mon imprévoyance, je n’avais pas songé que si lui-même venait à manquer ou bien était forcé de s’éloigner sans avoir pu remplir la mission de pourvoyeur que je lui avais confié, Angeline et la mère d’Attenousse se trouveraient toutes deux dans un complet dénuement comme la chose est arrivée. Cette vieille sauvagesse était la même qui s’était mise à ma piste le jour de la mort.


CHAPITRE XIII

la brise.


Deux jours après, je partis à la tête de guerriers que j’avais plus d’une fois conduits au combat. Mais je l’avoue, cette fois ce n’était plus la pensée, l’espoir ou plutôt le désespoir de rencontrer la mort qui me guidait, mais bien le ferme désir de faire à Angeline les jours aussi heureux que je les lui destinais misérables et tourmentés auparavant. Les remords, ces cris de la conscience, ces inexo-