prier, la prière est un baume divin, peut-être m’inspirera-t-elle de nouvelles idées. »
« Sept : 10. Mon cher frère, je suis entré un peu plus tard dans la cellule aujourd’hui. J’ai dès le matin fait demander audience dans les maisons où l’on prie pour le salut de tous. Monseigneur l’Évêque de Québec m’a offert ses services d’une manière spontanée. Il doit aller les visiter pendant que de mon côté j’implorerai les prières des âmes charitables en faveur des malheureux qui vont mourir demain, sur la potence, car pour le condamné, les jours qui suivent la condamnation sont toujours la veille du supplice. »
« Tous m’ont promis leur concours et j’espère encore les retrouver dans de meilleures dispositions. »
« Je vous écris ces pages de ma chambre et maintenant il me semble que ce poids énorme ne pèse pas sur mes seules épaules. On m’a promis partout que des prières seraient offertes à Dieu. Elles seront dites et répétées dans chaque communauté et par toutes les personnes pieuses. »
« Je me trouve dans une disposition d’esprit bien différente des jours précédents. Je m’accuse d’avoir peut-être exprimé des paroles d’aigreur devant ces hommes qui pourraient être plus malheureux et ignorants que coupables. Je dirige mes pas vers la prison bien décidé à leur en demander pardon. Je pourrais prendre Dieu à témoin, que si je les ai offensés, c’est bien involontairement car je donnerais de grand cœur jusqu’à la dernière goutte de mon sang pour leur être utile. »
« Je marche d’un pas plus léger, plus alerte car l’espérance a fait renaître mon courage. À peine ai-je franchi les derniers degrés de la prison que je rencontre le saint Évêque. Il me tend la main, je la porte à mes lèvres avec respect, mais lui m’embrasse avec tendresse. Je n’ai pas le courage de l’interroger, son serrement de mains m’indique qu’à lui aussi était départie la part d’amertume comme aux bons autres prêtres qui ont tour à tour, mais en vain essayé d’obtenir d’eux une parole ou un signe de repentir. »
« Mon Dieu, j’ai pourtant bien prié dans les deux jours qui sont passés, je vais prier encore davantage mais je ne puis continuer d’écrire. »
« 19 Sept 11 heures P. M. »
« Pardonnez à mon écriture, ma main est tremblante et peut-être aurez-vous de la peine à déchiffrer le pauvre griffonnage que je fais. À peine quelques heures vont-elles s’écouler avant que la justice des hommes soit satisfaite, et je n’ai pu rien obtenir. La dernière nuit est épouvantable. »