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midable de Tartares, pouvant monter à dix mille hommes, avait paru à trente milles environ au-delà de la ville.

C’était une fort mauvaise nouvelle pour des voyageurs ; cependant, de la part du gouverneur, l’attention était louable, et nous fûmes très-contents d’apprendre que nous aurions une escorte. Deux jours après nous reçûmes donc deux cents soldats détachés d’une garnison chinoise sur notre gauche et trois cents autres de la ville de Naum, et avec ce renfort nous avançâmes hardiment. Les trois cents soldats de Naum marchaient à notre front, les deux cents autres à l’arrière-garde, nos gens de chaque côté des chameaux chargés de nos bagages, et toute la caravane au centre. Dans cet ordre et bien préparés au combat, nous nous croyions à même de répondre aux dix mille Tartares-Mongols, s’ils se présentaient ; mais le lendemain, quand ils se montrèrent, ce fut tout autre chose.

De très-bonne heure dans la matinée, comme nous quittions une petite ville assez bien située, nommée Changu, nous eûmes une rivière à traverser. Nous fûmes obligés de la passer dans un bac, et si les Tartares eussent eu quelque intelligence, c’est alors qu’ils nous eussent attaqués, tandis que la caravane était déjà sur l’autre rivage et l’arrière-garde encore en-deçà ; mais personne ne parut en ce lieu.

Environ trois heures après, quand nous fûmes entrés dans un désert de quinze ou seize milles d’étendue, à un nuage de poussière qui s’élevait nous présumâmes que l’ennemi était proche : et il était proche en effet, car il arrivait sur nous à toute bride.

Les Chinois de notre avant-garde qui la veille avaient eu le verbe si haut commencèrent à s’ébranler ; fréquemment ils regardaient derrière eux, signe certain chez un soldat qu’il est prêt à lever le camp. Mon vieux pilote fit la même