Page:Defoe - Robinson Crusoé, Borel et Varenne, 1836, tome 1.djvu/59

Cette page a été validée par deux contributeurs.

me dit que si je voulais le laisser aller à terre avec une des jarres, il découvrirait s’il y avait de l’eau et m’en apporterait. Je lui demandai pourquoi il y voulait aller ; pourquoi ne resterait-il pas dans la chaloupe, et moi-même n’irais-je pas ? Cet enfant me répondit avec tant d’affection que je l’en aimai toujours depuis. Il me dit : « — Si les sauvages hommes venir, eux manger moi, vous s’enfuir. » — « Bien, Xury, m’écriai-je, nous irons tous deux, et si les hommes sauvages viennent, nous les tuerons ; ils ne nous mangeront ni l’un ni l’autre. » — Alors je donnai à Xury un morceau de biscuit et à boire une gorgée de la liqueur tirée du coffre de notre patron, dont j’ai parlé précédemment ; puis, ayant halé la chaloupe aussi près du rivage que nous le jugions convenable, nous descendîmes à terre, n’emportant seulement avec nous que nos armes et deux jarres pour faire de l’eau.

Je n’eus garde d’aller hors de la vue de notre chaloupe, craignant une descente de canots de sauvages sur la rivière ; mais le petit garçon ayant aperçu un lieu bas à environ un mille dans les terres, il y courut, et aussitôt je le vis revenir vers moi. Je pensai qu’il était poursuivi par quelque Sauvage ou épouvanté par quelque bête féroce ; je volai à son secours ; mais quand je fus assez proche de lui, je distinguai quelque chose qui pendait sur son épaule : c’était un animal sur lequel il avait tiré, semblable à un lièvre, mais d’une couleur différente et plus long des jambes. Toutefois, nous en fûmes fort joyeux, car ce fut un excellent manger ; mais ce qui avait causé la grande joie du pauvre Xury, c’était de m’apporter la nouvelle qu’il avait trouvé de la bonne eau sans rencontrer de Sauvages.

Nous vîmes ensuite qu’il ne nous était pas nécessaire de prendre tant de peine pour faire de l’eau ; car un peu plus loin dans