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j’avais vu deux ou trois animaux semblables à des lièvres s’enfuir hors du bois où j’avais tiré sur l’oiseau.

Alors je commençai à réfléchir que je pourrais encore enlever du vaisseau bien des choses qui me seraient fort utiles, particulièrement des cordages et des voiles, et autres objets qui pourraient être transportés. Je résolus donc de faire un nouveau voyage à bord si c’était possible ; et, comme je n’ignorais pas que la première tourmente qui soufflerait briserait nécessairement le navire en mille pièces, je renonçai à rien entreprendre jusqu’à ce que j’en eusse retiré tout ce que je pourrais en avoir. Alors je tins conseil, en mes pensées veux-je dire, pour décider si je me resservirais du même radeau. Cela me parut impraticable ; aussi me déterminai-je à y retourner comme la première fois, quand la marée serait basse, ce que je fis ; seulement je me déshabillai avant de sortir de ma hutte, ne conservant qu’une chemise rayée[1], une paire de braies de toile et des escarpins.

Je me rendis pareillement à bord et je préparai un second radeau. Ayant eu l’expérience du premier, je fis celui-ci plus léger et je le chargeai moins pesamment ; j’emportais, toutefois, quantité de choses d’une très grande utilité pour moi. Premièrement, dans la soute aux rechanges du maître charpentier, je trouvai deux ou trois sacs pleins de pointes et de clous, une grande tarière, une douzaine ou deux de haches, et, de plus, cette chose d’un si grand usage nommée meule à aiguiser. Je mis tout cela à part, et j’y réunis beaucoup d’objets appartenant au canonnier,

  1. Saint-Hyacinthe a commis deux erreurs religieusement conservées dans toutes les éditions et répétées par touts ses plagiaires ; il a traduit a chiquered shirt par une chemise déchirée, et a pair of trowsers, haut-de-chausses à la matelote, par des caleçons. P. B.