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MOLL FLANDERS

Je me débattis pour me dégager, et toutefois je ne le fis que faiblement, et il me tint serrée, et continua de me baiser jusqu’à ce qu’il fût hors d’haleine ; et, s’asseyant, il dit :

— Chère Betty, je suis amoureux de vous.

Ses paroles, je dois l’avouer, m’enflammèrent le sang ; tous mes esprits volèrent à mon cœur et me mirent assez en désordre. Il répéta ensuite plusieurs fois qu’il était amoureux de moi, et mon cœur disait aussi clairement qu’une voix que j’en étais charmée ; oui, et chaque fois qu’il disait : « Je suis amoureux de vous », mes rougeurs répondaient clairement : « Je le voudrais bien, monsieur. » Toutefois, rien d’autre ne se passa alors ; ce ne fut qu’une surprise, et je me remis bientôt. Il serait resté plus longtemps avec moi, mais par hasard, il regarda à la fenêtre, et vit ses sœurs qui remontaient le jardin. Il prit donc congé, me baisa encore, me dit qu’il était très sérieux, et que j’en entendrais bien promptement davantage. Et le voilà parti infiniment joyeux, et s’il n’y avait eu un malheur en cela, j’aurais été dans le vrai, mais l’erreur était que Mme Betty était sérieuse et que le gentilhomme ne l’était pas.

À partir de ce temps, ma tête courut sur d’étranges choses, et je puis véritablement dire que je n’étais pas moi-même, d’avoir un tel gentilhomme qui me répétait qu’il était amoureux de moi, et que j’étais une si charmante créature, comme il me disait que je l’étais : c’étaient là des choses que je ne savais comment supporter ; ma vanité était élevée au dernier degré. Il est vrai que j’avais la tête pleine d’orgueil, mais, ne sachant rien des vices de ce temps, je n’avais pas une pensée sur