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MOLL FLANDERS

côte d’Irlande par une bourrasque bien forte, le vaisseau jeta l’ancre dans une petite baie près d’une rivière dont je ne me rappelle pas le nom, mais on me dit que c’était une rivière qui venait de Limerick et que c’était la plus grande rivière d’Irlande.

Là, ayant été retenus par le mauvais temps, le capitaine qui continuait de montrer la même humeur charmante, nous emmena de nouveau tous deux à terre. Ce fut par bonté pour mon mari, en vérité qui supportait fort mal la mer, surtout quand le vent soufflait avec tant de fureur. Là, nous achetâmes encore des provisions fraîches, du bœuf, du porc, du mouton et de la volaille, et le capitaine resta pour mettre en saumure cinq ou six barils de bœuf, afin de renforcer les vivres. Nous ne fûmes pas là plus de cinq jours que la température s’adoucissant après une bonne saute de vent, nous fîmes voile de nouveau et, au bout de quarante-deux jours, arrivâmes sans encombre à la côte de Virginie.

Quand nous approchâmes de terre, le capitaine me fit venir et me dit qu’il trouvait par mon discours que j’avais quelques connaissances dans la contrée et que j’y étais venue autrefois, de sorte qu’il supposait que je connaissais la coutume suivant laquelle on disposait des forçats à leur arrivée. Je lui dis qu’il n’en était rien et que pour les connaissances que j’avais là, il pouvait être certain que je ne me ferais point connaître à aucune d’elles tandis que j’étais dans les conditions d’une prisonnière, et que, pour le reste, nous nous abandonnions entièrement à lui pour nous assister ainsi qu’il lui avait plu de nous le promettre. Il me dit qu’il fallait qu’une personne du pays vînt m’acheter comme esclave, afin de répondre de moi