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MOLL FLANDERS

excepté mon argent, que je conservais à part dans un tiroir secret de mon coffre et qu’on ne pouvait découvrir ou bien ouvrir, si on le découvrait, sans mettre le coffre en pièces.

Le vaisseau commença maintenant de se remplir : plusieurs passagers vinrent à bord qui n’avaient point été embarqués à compte criminel, et on leur désigna de quoi s’accommoder dans la grande cabine et autres parties du vaisseau, tandis que nous, forçats, on nous fourra en bas je ne sais où. Mais quand mon mari vint à bord, je parlai au bosseman qui m’avait de si bonne heure donné des marques d’amitié ; je lui dis qu’il m’avait aidée en bien des choses et que je ne lui avais fait aucun retour qui convînt et là-dessus je lui mis une guinée dans la main ; je lui dis que mon mari était maintenant venu à bord et que, bien que nous fussions dans notre infortune présente, cependant nous avions été des personnes d’un autre caractère que la bande misérable avec laquelle nous étions venus, et que nous désirions savoir si on ne pourrait obtenir du capitaine de nous admettre à quelque commodité dans le vaisseau, chose pour laquelle nous lui ferions la satisfaction qu’il lui plairait et que nous le payerions de sa peine pour nous avoir procuré cette faveur. Il prit la guinée, ainsi que je pus voir, avec grande satisfaction, et m’assura de son assistance.

Puis il nous dit qu’il ne faisait point doute que le capitaine, qui était un des hommes de la meilleure humeur qui fût au monde, ne consentirait volontiers à nous donner les aises que nous pourrions désirer, et pour nous rassurer là-dessus, il me dit qu’à la prochaine marée il irait le trouver à seule fin de lui en parler. Le lendemain ma-