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MOLL FLANDERS

Toute cette nuit je couchai sur la dure, comme les autres prisonniers ; mais ensuite on nous donna de petites cabines — du moins à ceux qui avaient quelque literie à y mettre, ainsi qu’un coin pour les malles ou caisses de vêtements ou de linge, si nous en avions (ce qu’on peut bien ajouter), car quelques-uns n’avaient point de chemise de linge ou de laine que celle qui était sur leur dos, et pas un denier pour se tirer d’affaire ; pourtant ils ne furent pas trop malheureux à bord, surtout les femmes, à qui les marins donnaient de l’argent pour laver leur linge, etc., ce qui leur suffisait pour acheter ce dont elles avaient besoin.

Quand, le matin suivant, nous eûmes la liberté de monter sur le tillac, je demandai à l’un des officiers si je ne pouvais être autorisée à envoyer une lettre à terre pour mes amis, afin de leur faire savoir l’endroit où nous étions et de me faire envoyer quelques choses nécessaires. C’était le bosseman, homme fort civil et affable, qui me dit que j’aurais toute liberté que je désirerais et qu’il pût me donner sans imprudence ; je lui dis que je n’en désirais point d’autre et il me répondit que le canot du navire irait à Londres à la marée suivante, et qu’il donnerait ordre qu’on portât ma lettre.

En effet quand le canot partit, le bosseman vint m’en avertir, me dit qu’il y montait lui-même, et que si ma lettre était prête, il en prendrait soin. J’avais préparé d’avance plume, encre et papier, et j’avais fait une lettre adressée à ma gouvernante dans laquelle j’en avais enfermé une autre pour mon camarade de prison : mais je ne lui laissai pas savoir que c’était mon mari, et je le lui cachai jusqu’à la fin. Dans ma lettre à ma gouvernante