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MOLL FLANDERS

sez point Sir *** : c’est bien le plus honnête gentilhomme qu’il y ait au monde ; il n’y a pas dans toute la cité d’homme plus élégant ni de personne plus sobre et plus modeste ; il a horreur de toutes ces choses ; il n’y a personne qui le connaisse à qui pareille idée pût venir.

— Allons, allons, dit ma gouvernante, ce ne sont point mes affaires ; autrement je vous assure que je trouverais là dedans quelque peu de ce que j’ai dit : tous vos hommes de réputation modeste ne valent parfois guère mieux que les autres ; ils ont seulement meilleure tenue, ou si vous voulez, ce sont de meilleurs hypocrites.

— Non, non, dit mon amie ; je puis vous assurer que Sir *** n’est point un hypocrite ; c’est vraiment un gentilhomme sobre et honnête et sans aucun doute il a été volé.

— Nenni, dit ma gouvernante, je ne dis point le contraire ; ce ne sont pas mes affaires, vous dis-je ; je veux seulement lui parler : mon affaire est d’autre nature.

— Mais, dit son amie, quelle que soit la nature de votre affaire, c’est impossible en ce moment ; vous ne sauriez le voir : il est très indisposé et fort meurtri.

— Ah oui ! dit ma gouvernante, il est donc tombé en de bien mauvaises mains ?

Et puis elle demanda gravement :

— Où est-il meurtri, je vous prie ?

— Mais à la tête, dit mon amie, à une de ses mains et à la figure, car ils l’ont traité avec barbarie.

— Pauvre gentilhomme, dit ma gouvernante ; alors il faut que j’attende qu’il soit remis, et elle ajouta : j’espère que ce sera bientôt.