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MOLL FLANDERS

bien que je continuai et que j’apportai le paquet d’argenterie, qui était très considérable, droit à la maison, chez ma vieille gouvernante ; elle me dit qu’elle ne voulait pas l’ouvrir, mais me pria de m’en retourner et d’aller en chercher d’autre.

Elle me fit jouer le même jeu chez la dame de la maison qui touchait celle qui était en feu, et je fis tous mes efforts pour arriver jusque-là ; mais à cette heure l’alarme du feu était si grande, tant de pompes à incendie en mouvement et la presse du peuple si forte dans la rue, que je ne pus m’approcher de la maison quoi que je fisse, si bien que je revins chez ma gouvernante, et montant le paquet dans ma chambre, je commençai à l’examiner. C’est avec horreur que je dis quel trésor j’y trouvai ; il suffira de rapporter qu’outre la plus grande partie de la vaisselle plate de la famille, qui était considérable, je trouvai une chaîne d’or, façonnée à l’ancienne mode, dont le fermoir était brisé, de sorte que je suppose qu’on ne s’en était pas servi depuis des années ; mais l’or n’en était pas plus mauvais : aussi un petit coffret de bagues de deuil, l’anneau de mariage de la dame, et quelques morceaux brisés de vieux fermoirs d’or, une montre en or, et une bourse contenant environ la somme de 24 £ en vieilles pièces de monnaie d’or, et diverses autres choses de valeur.

Ce fut là le plus grand et le pire butin où je fus jamais mêlée ; car en vérité bien que, ainsi que je l’ai dit plus haut, je fusse endurcie maintenant au-delà de tout pour voir de réflexion en d’autres cas, cependant je me sentis véritablement touchée jusqu’à l’âme même, quand je jetai les yeux sur ce trésor : de penser à la pauvre dame