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MOLL FLANDERS

pondit « oui » à cette offre dès les premiers mots, mais il était nécessaire de jouer un peu l’hypocrite avec lui, de sorte que je parus décliner la motion avec quelque animation, sous le prétexte qu’il n’avait point de bonne foi. Je lui dis qu’une telle proposition ne pouvait avoir de sens, et qu’elle nous emmêlerait tous deux en des difficultés inextricables, puisque si, en fin de compte, il n’obtenait pas le divorce, pourtant nous ne pourrions dissoudre le mariage, non plus qu’y persister ; de sorte que s’il était désappointé dans ce divorce, je lui laissais à considérer la condition où nous serions tous deux.

En somme, je poussai mes arguments au point que je le convainquis que c’était une proposition où il n’y avait point de sens ; alors il passa à une autre, qui était que je lui signerais et scellerais un contrat, m’engageant à l’épouser sitôt qu’il aurait obtenu le divorce, le contrat étant nul s’il n’y pouvait parvenir.

Je lui dis qu’il y avait plus de raison en celle-ci qu’en l’autre ; mais que ceci étant le premier moment où je pouvais imaginer qu’il eût assez de faiblesse pour parler sérieusement, je n’avais point coutume de répondre « oui » à la première demande, et que j’y réfléchirais. Je jouais avec cet amant comme un pêcheur avec une truite ; je voyais qu’il était grippé à l’hameçon, de sorte que je le plaisantai sur sa nouvelle proposition, et que je différai ma réponse ; je lui dis qu’il était bien peu informé sur moi, et le priai de s’enquérir ; je lui permis aussi de me reconduire à mon logement, mais je ne voulus point lui offrir d’entrer, car je lui dis que ce serait peu décent.

En somme, je me risquai à éviter de signer un contrat, et la raison que j’en avais est que la dame qui m’avait