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MOLL FLANDERS

mais l’objet était de tirer de lui ces dernières 50 £, sachant fort bien que ce serait le dernier sou que j’aurais à attendre de lui.

Néanmoins, l’argument que j’avais envoyé en lui promettant une quittance générale et de ne plus jamais l’inquiéter, prévalut effectivement, et il m’envoya un billet pour cette somme par une personne qui m’apportait une quittance générale à signer, ce que je fis franchement ; et ainsi, bien amèrement contre ma volonté, l’affaire se trouva entièrement terminée.

J’étais maintenant une personne isolée, de nouveau, comme je puis bien m’appeler ; j’étais déliée de toutes les obligations soit de femme mariée, soit de maîtresse, qui fussent au monde ; excepté mon mari le marchand de toile dont je n’avais pas entendu parler maintenant depuis près de quinze ans, personne ne pouvait me blâmer pour me croire entièrement libérée de tous ; considérant surtout qu’il m’avait dit à son départ que si je n’avais point de nouvelles fréquentes de lui, j’en devrais conclure qu’il était mort, et que je pourrais librement me remarier avec celui qu’il me plairait.

Je commençai maintenant à dresser mes comptes ; j’avais par maintes lettres et grande importunité, et aussi par l’intercession de ma mère, obtenu de mon frère un nouvel envoi de quelques marchandises de Virginie, afin de compenser l’avarie de la cargaison que j’avais emportée et ceci aussi avait été à la condition que je lui scellerais une quittance générale, ce que j’avais dû promettre, si dur que cela me parût. Je sus si bien disposer mes affaires, que je fis enlever les marchandises, avant d’avoir signé la quittance : et ensuite je découvris sans