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CHAPITRE III



Sommaire. — Amy s’enquiert des habitudes de son ancien maître. — Son train de vie méprisable. — Le prince est charmé d’avoir un fils. — Il m’invite à l’accompagner en Italie. — En Italie par les Alpes. — Nous visitons Naples et Venise. — Retour à Paris. — La princesse tombe malade et meurt. — Le prince refuse de me voir. — Un marchand offre de disposer de mes joyaux. — Singulière accusation portée par un Juif. — Plan pour me dérober mes joyaux. — Le marchand me conseille de partir. — Amy et moi nous prenons congé de la France. — Terrible tempête sur la côte de Hollande. — Une conscience coupable s’accuse elle-même. — Nous sommes jetés dans le port de Harwich. — Je vais en paquebot à Rotterdam. — Parallèle entre la maîtresse et la femme mariée. — Mon marchand de Paris me retrouve à Rotterdam.




Tout ceci la coquine le lui dit avec tant d’adresse, elle le mania et le cajola si bien, se frotta les yeux et pleura avec tant d’art, qu’il prit tout comme elle avait l’intention qu’il le prît, et qu’une fois ou deux elle lui vit les yeux également pleins de larmes. Il lui dit que c’était une touchante, mélancolique histoire, qui lui avait d’abord presque brisé le cœur ; mais qu’il était poussé à la dernière extrémité, et qu’il n’aurait pu que rester pour les voir tous mourir de faim, chose dont il ne pouvait supporter la pensée, car il se serait cassé la tête d’un coup de pistolet si cela était arrivé pendant qu’il était là-bas ; qu’il m’avait laissé, à moi, sa femme, tout l’argent qu’il avait au monde, moins vingt-cinq livres sterling, ce qui était aussi peu qu’il pût emporter avec lui pour chercher fortune dans le monde. Tous ses parents étant riches, il se croyait sûr qu’ils prendraient soin des pauvres