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je commençais à comprendre les intentions du prince ; et il déclara que j’étais la plus belle créature du monde.

« Et où ai-je donc vécu, dit-il, et combien ai-je été mal servi, qu’on ne m’a jamais encore montré la plus charmante femme de France ! »

C’était là le meilleur moyen du monde de faire brèche à ma vertu, si j’en avais possédé aucune ; j’étais, en effet, devenue la plus vaine créature qui fût sur terre, surtout de ma beauté ; car comme elle était admirée des autres, je devenais de jour en jour plus follement amoureuse de moi-même.

Il me dit, après cela, des choses très aimables, et resta assis près de moi pendant une heure ou plus. Alors, se levant et appelant son gentilhomme par son nom, il ouvrit la porte :

« À boire ! » dit-il.

Sur quoi le gentilhomme apporta immédiatement une petite table recouverte d’un fin tapis de damas. La table était assez petite pour qu’il pût la porter de ses deux mains ; mais dessus étaient servis deux carafes, une de champagne et l’autre d’eau, six assiettes d’argent, et un dessert de fines sucreries dans des plats de porcelaine fine disposés les uns au-dessus des autres sur une série de supports circulaires et superposés d’une hauteur de vingt pouces environ. Au-dessous étaient trois perdrix rôties et une caille. Aussitôt que son gentilhomme eut tout placé, il lui donna l’ordre de se retirer.

« Et maintenant, dit le prince, j’ai l’intention de souper avec vous. »

Lorsqu’il avait renvoyé son gentilhomme, je m’étais levée et offerte à servir Son Altesse pendant qu’elle mangerait. Mais il refusa positivement, et me dit :

« Non. Demain vous serez la veuve de Monsieur ***, le joaillier ; mais ce soir, vous serez ma maîtresse. Asseyez-vous donc, et mangez avec moi ; ou je vais me lever et servir. »

J’aurais alors voulu appeler ma servante Amy, mais je pensai que cela non plus ne serait pas convenable. Je m’excusai donc, disant que, puisque Son Altesse ne voulait pas laisser sa servante le servir, je ne me permettrais pas de faire monter ma femme de chambre ; mais que s’il lui plaisait de me laisser