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Je fus frappée comme d’une rafale venue d’en haut, à la lecture de cette lettre. Je me mis à trembler de la tête aux pieds et à courir égarée à travers la chambre comme une folle furieuse. Je n’avais personne à qui dire un mot, auprès de qui donner issue à ma passion. Je ne prononçai pas une parole pendant longtemps, jusqu’à ce que la douleur m’eût presque brisée. Alors je me jetai sur mon lit et je criai :

« Seigneur, ayez pitié de moi ! Elle a assassiné mon enfant ! » Et un flot de larmes éclata, et je pleurai violemment pendant plus d’une heure.

Mon mari était heureusement dehors, à la chasse, de sorte que je pus être seule et donner quelque soulagement à mon émotion, ce qui me fit revenir un peu à moi. Mais lorsque mes pleurs eurent cessé, je tombai dans un nouvel accès de rage contre Amy ; je l’appelai mille fois démon, monstre, tigre au cœur dur. Je le lui reprochais d’autant plus qu’elle savait que j’en abhorrais l’idée, et que je le lui avais montré suffisamment en la jetant dehors, pour ainsi dire, après tant d’années d’amitié et de service, rien que pour en avoir parlé devant moi.