Page:Defoe - Lady Roxana.djvu/294

Cette page a été validée par deux contributeurs.

se rapporte à l’Angleterre, du moins tout ce que j’en mettrai dans ce récit.

J’ai indiqué en gros ce que j’avais fait pour mes deux fils, l’un à Messine, l’autre aux Indes. Mais je n’ai pas été jusqu’au bout de l’histoire de mes deux filles. Je courais tellement le danger d’être reconnue par une d’elles que je n’osais pas la voir, de peur de lui faire savoir qui j’étais. Quant à l’autre, je ne pouvais guère trouver aucun moyen de la voir, de la reconnaître, ni de la laisser me voir, parce qu’elle aurait alors nécessairement su que je ne voulais pas me faire connaître de sa sœur, ce qui aurait paru étrange ; si bien que, tout considéré, je me déterminai à ne voir ni l’une ni l’autre. Mais Amy arrangea tout pour moi. Après en avoir fait deux dames en leur donnant une bonne, quoique tardive, éducation, elle fut sur le point de tout perdre, et elle et moi en même temps, en se découvrant malheureusement à la dernière d’entre elles, c’est à dire à celle qui avait été notre cuisinière, et que, comme je l’ai dit plus haut, Amy avait été obligée de mettre à la porte, dans la crainte de cette découverte qui précisément arrivait. J’ai déjà indiqué comment Amy s’occupait d’elle par une tierce personne, et comment la jeune fille, lorsqu’elle eut été mise sur le pied d’une demoiselle, était venue faire visite à Amy chez moi. C’est après cela qu’Amy allant, suivant sa coutume, voir le frère de la jeune fille (mon fils), chez l’honnête homme de Spitalfields, il se trouva que les deux filles étaient là en même temps, par pur hasard ; et la seconde, sans y prendre garde, découvrit le secret, à savoir que c’était là la dame qui avait tout fait pour elles.

Amy se trouva fort surprise. Mais voyant qu’il n’y avait pas de remède, elle tourna la chose en plaisanterie, et dès lors s’entretint avec elles librement, continuant à être persuadée que ni l’une ni l’autre ne pourraient tirer grand parti de ce secret tant qu’elles ne sauraient rien de moi. En conséquence, elle les prit ensemble un jour et leur raconta l’histoire, comme elle disait, de leur mère, la commençant lorsqu’elles avaient été si misérablement transportées chez leur tante ; elle déclara qu’elle n’était pas leur mère, et elle leur fit son portrait. Lorsqu’elle dit qu’elle n’était pas leur mère, une d’elles exprima une grande