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la civilité d’une réponse à la dernière que je lui avais écrite et qu’il ne pouvait supposer que je m’attendisse à un retour de sa part, après m’être mise si bas et m’être livrée d’une manière à laquelle je n’étais pas accoutumée. Après cela, je n’avais, il est vrai, jamais plus envoyé chercher de lettres au lieu où j’avais ordonné d’adresser les siennes ; car, punie justement, à ce que je pensais, de ma faiblesse, je n’avais qu’à me repentir d’être devenue une sotte après m’être strictement tenue auparavant à un principe juste. Cependant, comme ce que je faisais était plutôt sous l’impulsion de la gratitude que par faiblesse réelle, de quelque manière qu’il l’interprétât, j’avais eu du moins la satisfaction de m’être pleinement acquittée de ma dette. J’ajoutai que les occasions ne m’avaient pas manqué d’obtenir tous les prétendus avantages qui, suivant lui, accompagnent la félicité de la vie conjugale, et que j’aurais pu être ce que je ne tenais pas nommer ; mais quelque bas que je me fusse mise devant lui, j’avais maintenant la dignité féminine pour me soutenir contre toutes les attaques soit de l’orgueil, soit de l’avidité ; je lui étais infiniment obligée de m’avoir fourni l’occasion d’acquitter la seule obligation qui me mît en danger, sans en examiner les conséquences ; j’espérais qu’il était persuadé que j’avais payé ma dette en offrant de m’enchaîner ; mais j’étais infiniment plus sa débitrice d’une autre manière, puisqu’il m’avait permis de rester libre.

Il fut si confondu de ce discours qu’il ne sut que dire et resta tout à fait muet un bon moment. Mais se remettant un peu, il me dit que je me lançais dans des considérations qu’il espérait passées et oubliées, et qu’il n’avait pas l’intention de les faire revivre ; il savait que je n’avais pas eu ses lettres, car, dès qu’il était arrivé en Angleterre, il était allé à l’endroit où elles étaient adressées, et il les avaient trouvées toutes là en dépôt, à l’exception d’une seule, et les gens n’avaient pas su comment les faire remettre ; il pensait trouver là des renseignements pour le diriger dans ses recherches, mais il eut le désagrément d’apprendre qu’on ne savait pas seulement qui j’étais ; ce lui fut une grande contrariété, et je devais reconnaître, pour répondre à tous mes ressentiments, qu’il avait fait une longue, et, il l’espé-