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tionne, — m’amenèrent à considérer la vie que je menais, et à résoudre de prendre quelque ligne de conduite où je ne serais pas un scandale à ma famille et où je ne craindrais pas de me faire connaître de mes propres enfants, qui étaient mon sang et ma chair.

J’avais encore une autre fille dont nous ne pûmes, malgré toutes nos recherches, apprendre rien du tout, ni de bon ni de mauvais, pendant plusieurs années après avoir trouvé la première. Mais je reviens à mon histoire personnelle.

Étant alors éloignée de mon ancien séjour, je semblais en bonne voie pour me retirer de mes anciennes connaissances, et, par suite, du vil et abominable trafic que j’avais exercé si longtemps ; de sorte qu’il semblait y avoir, comme on dit, une porte tout spécialement ouverte à ma réforme, pour peu que j’en eusse sérieusement le désir. Malgré cela, cependant, quelques-uns de mes anciens amis, comme j’avais eu l’habitude de les appeler, s’enquirent de moi et vinrent me rendre visite à Kensington ; et cela, plus fréquemment que je ne l’aurais souhaité. Mais le lieu où j’étais une fois connu, il n’y avait pas moyen de les éviter, à moins de leur refuser tout net ma porte et de leur faire outrage ; et mes résolutions n’étaient pas encore assez sérieuses pour aller jusque-là.

Ce qu’il y eut de mieux, c’est que mon vieux débauché d’amant, que je haïssais de tout mon cœur, me lâcha tout à fait. Il vint une fois pour me voir ; mais je me fis céler par Amy, en l’envoyant dire que j’étais sortie. Elle fit la commission d’un air si étrange que Sa Seigneurie, en s’en allant, lui dit d’un air froid :

« Bien, bien, Mrs Amy, je vois que votre maîtresse ne désire pas me voir. Dites-lui que je ne la dérangerai plus davantage. »

Et il s’éloigna, en répétant deux ou trois fois les mots « plus davantage ».

Cela me donna un peu à songer d’abord, comme étant de la dureté vis-à-vis d’un homme dont j’avais reçu tant de présents considérables. Mais, comme je l’ai dit, j’étais dégoûtée de lui, et cela pour certaines raisons qui, si je pouvais me permettre