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j’avais préparé tout pour partir, de sorte que je n’avais guère qu’à m’en retourner, à prendre deux ou trois boîtes, paquets et choses de ce genre, avec ma servante Amy, et à m’en aller.

Le marchand me dit ensuite les mesures qu’il avait résolu de prendre pour tromper le Juif, tandis que je m’échapperais. Elles étaient vraiment très bien concertées.

« D’abord, dit-il, lorsqu’il viendra demain, je lui dirai que je vous ai proposé de me laisser les bijoux, comme il était convenu, mais que vous avez dit que vous me les rapporteriez dans l’après-midi ; de sorte qu’il faudra vous attendre jusqu’à quatre heures. À ce moment, je lui montrerai, comme si je venais de la recevoir, une lettre de vous, dans laquelle vous vous excuserez de ne pas venir parce que quelque visite vous est survenue et vous retient ; mais vous prierez de faire en sorte que ce monsieur soit prêt à acheter vos joyaux et vous promettez de venir demain à la même heure, sans faute.

« Le lendemain, nous vous attendrons à l’heure fixée ; et, comme vous ne paraîtrez pas, j’aurai l’air très mécontent et me demanderai quelle peut en être la raison. Alors nous conviendrons d’instituer une action contre vous le jour suivant ; mais le jour suivant, dans la matinée, j’enverrai l’avertir que vous avez passé chez moi et que, comme il n’y était pas, nous avons pris un autre rendez-vous, ajoutant que je désire lui parler. Lorsqu’il viendra, je lui dirai que vous semblez parfaitement aveugle sur le danger où vous êtes, que vous avez paru très contrariée de ne l’avoir pas rencontré, tout en n’ayant pas pu venir le soir précédent, et que vous m’avez fait promettre de l’avoir ici le lendemain à trois heures. Ce lendemain venu, vous enverrez dire que vous êtes si malade que vous ne pouvez sortir ce jour-là, mais que vous ne manquerez pas pour le jour suivant ; et, le jour suivant, vous ne viendrez ni n’avertirez, et nous n’entendrons plus jamais parler de vous ; car, à ce moment-là, vous serez en Hollande, si vous le voulez bien. »

Je ne pouvais qu’approuver toutes ces mesures, voyant qu’elles étaient si bien et si amicalement concertées dans mon intérêt ; et comme il semblait être absolument sincère, je me déterminai à remettre ma vie entre ses mains. J’allai tout de suite à mes