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tout à coup, ceux qui l’avaient si tranquillement pillé le traitèrent durement.

On lui reprochait d’avoir trop de sympathie pour M. Mascagni et pas assez d’adoration pour Wagner. — Ce reproche est aussi faux qu’il est inadmissible. M. Massenet continuait héroïquement à vouloir l’approbation de ses admiratrices habituelles : j’avoue ne pas comprendre pourquoi il vaut mieux plaire à de vieilles wagnériennes cosmopolites qu’à des jeunes femmes parfumées et même ne jouant pas très bien du piano. Une fois pour toutes, il avait raison… On ne peut sérieusement lui reprocher que d’avoir fait des infidélités à Manon… Il avait trouvé là le cadre qui convenait à ses habitudes de « flirt » et il ne devait pas les forcer à entrer à l’Opéra ? On ne « flirte » pas à l’Opéra ; on crie très fort des mots incompréhensibles ; si l’on y échange des serments, c’est avec l’assentiment des trombones : logiquement, les nuances changeantes d’un sentiment doivent s’y perdre parmi tant de clameur obligée. Enfin, il eût mieux fait de continuer d’assouplir son génie des teintes claires et des mélodies chuchotantes, dans des œuvres faites de légèreté ; cela n’excluait pas des recherches d’art, elles étaient seulement plus délicates et voilà tout. Il ne manque pourtant pas de musiciens qui portent la musique à bras tendus pendant que hurlent les trompettes… Pourquoi en grossir inu-