elle reçut tout de l’église, et sa forme essentielle et ses institutions, et son admirable hiérarchie. Gibbon lui-même en fait l’aveu. Ce furent les souverains pontifes, ce furent les évêques qui, appelant nos grossiers ancêtres à la vraie civilisation, créèrent, avec la royauté, les monarchies chrétiennes, qu’ils travailloient sans cesse à perfectionner. On chercheroit en vain dans l’antiquité rien de semblable à ce genre de gouvernement, qui n’y pouvoit avoir de modèle, puisqu’il n’étoit que l’expression publique du christianisme et des nouveaux rapports qu’il avoit établis entre les hommes, la manifestation pour ainsi dire sociale de ses préceptes et de ses dogmes mêmes.
Indépendamment de ce qui touche la constitution intime de l’état, les règles de discipline établies par l’église, la forme de ses jugements et de ses tribunaux, eurent une influence aussi heureuse qu’étendue sur la législation civile. Cette influence est surtout remarquable dans les capitulaires de nos premiers rois, monument trop peu admiré de sagesse et de justice. Il est vrai cependant que des erreurs et des passions, diverses selon les époques, mais qui toujours tendoient à rompre l’unité politique en ébranlant l’unité religieuse, altérèrent peu à peu l’esprit de la société européenne, la détournèrent de sa direction, et en arrêtèrent les progrès, avant quelle eût atteint son parfait développement.