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leur camarade, avaient jeté par terre les fusils de bois, et s’étaient enfuis en prenant leurs jambes à leurs coups.

Dieu sait ce que le pauvre Bob qui, lui, n’osait s’enfuir, aurait eu encore à supporter si madame Delavaine ne s’était dit qu’il était temps d’intervenir.

« Qu’est-ce que c’est que ce tapage ? et pourquoi ces cris ? demanda-t-elle en s’adressant à son fils.

— Ce n’est rien Maman, répondit Gustave tout confus ; nous jouions aux soldats, je voulais montrer à mes petits nègres à faire l’exercice… et Bob brouille tout…et comme moi, je suis le capitaine…

— Tu l’as battu, n’est-ce pas ?

— Il le fallait, maman, pour me faire obéir.

— Tu devrais commencer par te faire aimer mon fils, et ce n’est pas en maltraitant ces pauvres petits garçons qui veulent bien se prêter à tes caprices que tu y parviendras. Ce que tu viens de faire est bien mal, Gustave… cela dénote un mauvais cœur. Un enfant doit s’amuser ; mais il doit en même temps être poli, aimable et ne pas brutaliser ses camarades.

— Ces petits nègres, mes camarades, maman ? allons donc ! ce sont mes esclaves…

— Si vous êtes si fier, pourquoi alors jouez-vous avec eux ?

— Parce que je n’ai personne d’autre ici pour jouer avec moi.

— Vraiment, monsieur ! Vous me faites honte ! » Et maman Delavaine observait le petit Bob qui ne s’était pas sauvé comme les autres, mais qui se frottait la poitrine en pleurant.

« Viens ici Bob, dit-elle et prends cette pièce de dix sous ; je te la donne pour te consoler des rigueurs de ton méchant capitaine.

— Merci, maitresse, dit le petit lieutenant en mettant dans la poche de sa vareuse l’argent que Madame Delavaine venait de lui glisser dans la main. Je vous demande bien pardon, maitre Gustave.