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pagnie de quelques Ingénieurs ; j’ay souvent eu occaſion de donner carriere à mes Réflexions, & de remarquer le bon et le mauvais des Païs ; d’en examiner l’état et la ſituation, & celuy des peuples, dont la pauvreté ayant ſouvent excité ma compaſſion, m’a donné lieu d’en rechercher la cauſe. Ce qu’ayant fait avec beaucoup de ſoin, j’ay trouvé qu’elle répondoit parfaitement à ce qu’en a écrit l’Auteur du Détail de la France, qui a dévelopé & mis au jour fort naturellement les abus et mal-façons qui ſe pratiquent dans l’imposition et la levée des Tailles, des Aydes et des Doüanes Provinciales. Il ſeroit à ſouhaiter qu’il en eût autant fait des Affaires extraordinaires, de la Capitation, & du prodigieux nombre d’Exempts qu’il y a preſentement dans le Royaume, qui ne luy ont guéres moins cauſé de mal, que les trois autres, qu’il nous a ſi bien dépeints. Il eſt certain que ce mal eſt pouſſé à l’excés, & que ſi on n’y remedie, le menu Peuple tombera dans une extrêmité dont il ne ſe relevera jamais ; les grands chemins de la Campagne, & les ruës des Villes & des Bourgs étans pleins de Mandians, que la faim et la nudité chaſſent de chez eux.

Par toutes les recherches que j’ay pû faire, depuis pluſieurs années que je m’y applique, j’ay fort bien remarqué que dans ces derniers temps, prés de la dixiéme partie du Peuple eſt réduite à la mandicité, & mandie effectivement ; que des