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D’UNE FEMME SENSIBLE.

pourquoi ne l’ai-je pas écoutée ? Mais l’image de cette femme qui vous enlevait au milieu de la nuit semblait comme une furie s’attacher à me poursuivre. Hors de moi, je marchais avec tant d’agitation que je me trouvai près de votre demeure quand je m’en croyais encore bien loin. Que dans l’égarement de la passion nous savons peu nous-mêmes ce que nous désirons ! Je brûlais d’arriver ; mais quand je commençai à apercevoir votre porte, quand je vins à penser que je devais en franchir le seuil, à la vue d’un public entier, toutes mes résolutions s’évanouirent ; mon sang se retira vers mon cœur ; une barrière sans cesse renaissante me semblait s’élever devant chacun de mes pas. Poussée par mon désespoir, je la franchissais toujours, mais avec tant de peine et d’anxiété, qu’arrivée devant cette porte si effrayante pour moi, je ne sais ce que je crus voir, mais qu’il me parut que j’allais mourir. Dans cet état, j’aperçus confusément Charles qui vint à moi, suivi d’un de vos gens dont la vue acheva de m’anéantir. Il est si dur d’avoir à rougir devant un inférieur ! Sachant à peine ce que je faisais, je me hâ-