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D’UNE FEMME SENSIBLE.

la douleur. Je n’ai pu faire deux traits de suite, et je reviens à toi. Si les arts veulent un cœur ardent, il leur faut aussi un esprit libre. Et peut-on avoir l’esprit libre avec une passion dans l’âme ? La terrible chose qu’une passion, cher ami ! Nous met-elle au-dessus ou au-dessous de nous-mêmes ? c’est ce que je ne puis dire. C’est un tourbillon violent qui s’empare de nos facultés, de nos pensées, de nos sensations, et les porte toutes d’un seul côté, sur un seul point. Si nous trouvons des forces extraordinaires pour ce qui émane de ce foyer brûlant, tout ce qui y est étranger est aussi comme anéanti pour nous. Nous n’existons plus que par une partie de nous-mêmes qui absorbe toutes les autres. Avant que je te connusse, ma vie coulait comme un ruisseau toujours tranquille ; les arts, l’amitié embellissaient mes instants. Je jouissais des plaisirs de la société, du travail, de l’ivresse attachée à ses succès, des brillants avantages dont le sort a embelli mon existence : je t’ai vu, et tout a disparu ; je t’ai vu, et ton image seule est restée là, devant mes yeux. Dès lors, plus d’autres plai-