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CORINNE OU L’ITALIE.

Nelvil d’y consentir. — Quoi ! dit Corinne à M. Dickson, en tâchant de contenir le trouble affreux qui l’agitait, vous croyez que c’est seulement à cause de l’engagement qu’il a contracté, que lord Nelvil ne se marie pas avec miss Lucile Edgermond ? — J’en suis bien sûr, reprit M. Dickson, charmé d’être interrogé de nouveau ; ü y a trois jours encore j’ai vu lord Nelvil, et, bien qu’il ne m’ait pas expliqué la nature des liens qu’il avait formés en Italie, il m’a dit ces propres paroles, que j’ai mandées à lady Edgermond : Si j’étais libre, j’épouserais Lucile. — S’il était libre ! répéta Corinne ; — et dans ce moment sa voiture s’arrêta devant la porte de l’auberge où elle conduisait M. Dickson. Il voulut la remercier, lui demander dans quel lieu il pourrait la revoir. Corinne ne l’entendait plus. Elle lui serra la main sans pouvoir lui répondre, et le quitta sans avoir prononcé un seul mot. Il était tard ; cependant elle voulut aller encore dans les lieux où reposaient les cendres de son père. Le désordre de son esprit lui rendait ce pèlerinage sacré, plus nécessaire que jamais.