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CORINNE OU L’ITALIE.

Le lourd élément, soulevé par les Iremblemens de l’abîme, creuse les vallées, élève des monts, et ses vagues pétrifiées attestent les tempêtes qui déchirent son sein.

Si vous frappez sur ce sol, la voûte souterraine retentit. On dirait que le monde habité n’est plus qu’une surface prête à s’entr’ouvrir. La campagne de Naples est l’image des passions humaines : sulfureuse et féconde, ses dangers et ses plaisirs semblent naître de ces volcans enflammés qui donnent à l’air tant de charmes, et font gronder la foudre sous nos pas.

Pline étudiait la nature pour mieux admirer l’Italie ; il vantait son pays comme la plus belle des contrées, quand il ne pouvait plus l’honorer à d’autres titres. Cherchant la science comme un guerrier les conquêtes, il partit de ce promontoire même pour observer le Vésuve à travers les flammes, et ces flammes l’ont consumé.

Oh ! souvenir, noble puissance, ton empire est dans ces lieux ! De siècle en siècle, bizarre destinée ! l’homme se plaint de ce qu’il a perdu. L’on dirait que les temps écoulés sont tous dépositaires à leur tour d’un bonheur qui n’est plus ; et tandis que la pensée s’enor-