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CORINNE OU L’ITALIE

Il ranima l’antiquité par ses veilles, et loin que son imagination mît obstacle aux études les plus profondes, cette puissance créatrice, en lui soumettant l’avenir, lui révéla les secrets des siècles passés. Il éprouva que connaître sert beaucoup pour inventer, et son génie fut d’autant plus original, que, semblable aux forces éternelles, il sut être présent à tous les temps.

Notre air serein, notre climat riant ont inspiré l’Arioste. C’est l’arc-en-ciel qui parut après nos longues guerres : brillant et varié comme ce messager du beau temps, il semble se jouer familièrement avec la vie ; et sa gaieté légère et douce est le sourire de la nature, et non pas l’ironie de l’homme.

Michel-Ange, Raphaël, Pergolèse, Galilée, et vous intrépides voyageurs, avides de nouvelles contrées, bien que la nature ne pût vous offrir rien de plus beau que la vôtre ! joignez aussi votre gloire à celle des poëtes. Artistes, savans, philosophes, vous êtes comme eux enfans de ce soleil qui tour à tour développe l’imagination, concentre la pensée, excite le courage, endort dans le bonheur, et semble tout promettre ou tout faire oublier.