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CORINNE OU L’ITALIE

faire hommage, et vous remercier de la vie, et vous en remercier surtout quand un cœur aussi créé par vous répond tout entier au nôtre ! —

Une inspiration céleste animait dans cet instant la physionomie de Corinne. Oswald put à peine s’empêcher de se jeter à genoux devant elle au milieu du temple, et se tut pendant long-temps pour se livrer au plaisir de se rappeler ses paroles, et de les retrouver encore dans ses regards. Enfin, cependant, il voulut répondre, il ne voulut point abandonner la cause qui lui était chère. — Corinne, dit-il alors, permettez encore quelques mots à votre ami. Son ame n’a point de sécheresse ; non, Corinne, elle n’en a point, croyez-le ; et si j’aime l’austérité dans les principes et dans les actions, c’est parce qu’elle donne aux sentimens plus de profondeur et de durée. Si j’aime la raison dans la religion, c’est-à-dire si je repousse et les dogmes contradictoires et les moyens humains de faire effet sur les hommes, c’est parce que je vois la divinité dans la raison comme dans l’enthousiasme ; et si je ne puis souffrir qu’on affaiblisse l’homme d’aucune de ses facultés, c’est qu’il n’a pas trop de toutes pour connaître une vérité, que la réflexion lui révèle, aussi-bien que l’instinct du cœur, l’existence de Dieu et l’im-