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CORINNE OU L’ITALIE

tatif, est murmuré d’un ton sourd et presque rauque ; on dirait que c’est la réponse des caractères durs aux cœurs sensibles, que c’est le réel de la vie qui vient flétrir et repousser les vœux des ames généreuses ; et quand ce chœur si doux reprend, on renaît à l’espérance ; mais lorsque le verset récité recommence, une sensation de froid saisit de nouveau, ce n’est pas la terreur qui la cause, mais le découragement de l’enthousiasme. Enfin le dernier morceau, plus noble et plus touchant encore que tous les autres, laisse au fond de l’ame une impression douce et pure : Dieu nous accorde cette même impression avant de mourir.

On éteint les flambeaux ; la nuit s’avance ; les figures des Prophètes et des Sibylles apparaissent comme des fantômes enveloppés du crépuscule. Le silence est profond, la parole ferait un mal insupportable dans cet état de l’ame où tout est intime et intérieur ; et quand le dernier son s’éteint, chacun s’en va lentement et sans bruit ; chacun semble craindre de rentrer dans les intérêts vulgaires de ce monde.

Corinne suivit la procession qui se rendait dans le temple de Saint-Pierre, qui n’est alors éclairé que par une croix illuminée ; ce signe de