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CORINNE OU L’ITALIE

rappellent à ce point ; mais il est dans la nature d’aimer à se livrer à l’idée même que l’on redoute. Il y a comme un enivrement de tristesse qui fait à l’ame le bien de la remplir tout entière.

Un antique sarcophage d’un jeune enfant sert de fontaine à ce couvent. Le beau palmier dont Rome se vante est le seul arbre du jardin de ces moines ; mais ils ne font point d’attention aux objets extérieurs. Leur discipline est trop rigoureuse pour laisser à leur esprit aucun genre de liberté. Leurs regards sont abattus, leur démarche est lente, ils ne font plus en rien usage de leur volonté. Ils ont abdiqué le gouvernement d’eux-mêmes, tant cet empire fatigue son triste possesseur ! Ce séjour néanmoins n’agit pas fortement sur l’ame d’Oswald ; l’imagination se révolte contre une intention si manifeste de lui présenter le souvenir de la mort sous toutes les formes. Quand ce souvenir se rencontre d’une manière inattendue, quand c’est la nature qui nous en parle et non pas l’homme, l’impression que nous en recevons est bien plus profonde.

Des sentimens doux et calmes s’emparèrent de l’ame d’Oswald, lorsqu’au coucher du soleil il entra dans le jardin de San Giovanni et Paolo. Les moines de ce couvent sont soumis à des pratiques moins sévères, et leur jardin domine