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CORINNE OU L’ITALIE

peut renfermer avait, sûrement entendu les accords d’une belle musique à côté de l’objet qu’il aimait. Oswald en sentit la puissance, son ressentiment s’apaisa par degrés. L’attendrissement de Corinne expliqua tout, justifia tout ; il se rapprocha doucement, et Corinne l’entendit respirer auprès d’elle dans le moment le plus enchanteur de cette musique céleste ; c’en était trop, la tragédie la plus pathétique n’aurait pas excité dans son cœur autant de trouble que ce sentiment intime de l’émotion profonde qui les pénétrait tous deux en même temps, et que chaque instant, chaque son nouveau exaltait toujours plus. Les paroles que l’on chante ne sont pour rien dans cette émotion ; à peine quelques mots et d’amour et de mort dirigent-ils de temps en temps la réflexion, mais plus souvent le vague de la musique se prête à tous les mouvemens de l’ame, et chacun croit retrouver dans cette mélodie, comme dans l’astre pur et tranquille de la nuit, l’image de ce qu’il souhaite sur la terre.

— Sortons, dit Corinne à lord Nelvil ; je me sens prête à m’évanouir. — Qu’avez-vous, lui dit Oswald avec inquiétude ; vous palissez ; venez à l’air avec moi, venez. — Et ils sortirent ensemble. Corinne était soutenue par le bras