Page:De Staël - Corinne ou l'Italie, Tome I, 1807.djvu/338

Cette page a été validée par deux contributeurs.
334
CORINNE OU L’ITALIE

sein. C’est nécessairement subordonner la peinture à la poésie, que de la consacrer à des sujets traités par les grands poëtes ; car il reste de leurs paroles une impression qui efface tout, et presque toujours les situations qu’ils ont choisies tirent leur plus grande force du développement des passions et de leur éloquence, tandis que la plupart des effets pittoresques, naissent d’une beauté calme, d’une expression simple, d’une attitude noble, d’un moment de repos enfin, digne d’être indéfiniment prolongé, sans que le regard s’en lasse jamais.

Votre terrible Shakespeare, Mylord, continua Corinne, a fourni le sujet du troisième tableau dramatique. C’est Macbeth, l’invincible Macbeth, qui, prêt à combattre Macduff dont il a fait périr la femme et les enfans, apprend que l’oracle des sorcières s’est accompli, que la forêt de Birnam paraît s’avancer vers Dunsinane, et qu’il se bat avec un homme né depuis la mort de sa mère. Macbeth est vaincu par le sort, mais non par son adversaire. Il tient le glaive d’une main désespérée ; il sait qu’il va mourir, mais il veut essayer si la force humaine ne pourrait pas triompher du destin. Certainement il y a dans cette tête une belle expression de désordre et de fureur, de trouble et d’énergie ; mais à