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CORINNE OU L’ITALIE

inspirer ; enfin, il n’y avait pas de sécurité dans le bonheur que donnait lord Nelvil ; et peut-être faut-il expliquer, par ce tort même, l’exaltation de la passion de Corinne ; peut-être ne pouvait-elle aimer à ce point que celui qu’elle craignait de perdre. Un esprit supérieur, une sensibilité aussi ardente que délicate, pouvait se lasser de tout, excepté de l’homme vraiment extraordinaire, dont l’ame constamment ébranlée semblait, comme le ciel même, tantôt serein, tantôt couvert de nuages ; Oswald, toujours vrai, toujours profond et passionné, était néanmoins souvent prêt à renoncer à l’objet de sa tendresse, parce qu’une longue habitude de la peine lui faisait croire qu’il ne pouvait y avoir que du remords et de la souffrance dans les affections trop vives du cœur.

Lord Nelvil et Corinne, dans leur course à Tivoli, passèrent devant les ruines du palais d’Adrien, et du jardin immense qui l’entourait. Il avait réuni dans ce jardin les productions les plus rares, les chefs-d’œuvre les plus admirables des pays conquis par les Romains. On y voit encore aujourd’hui quelques pierres éparses qui s’appellent l’Egypte, l’Inde et l’Asie. Plus loin, était la retraite où Zénobie, reine de Pal-