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CORINNE OU L’ITALIE


CHAPITRE III


TOUT fut arrangé en peu de jours, les rôles distribués, et la soirée choisie pour la représentation dans un palais que possédait une parente du prince Castel-Forte, amie de Corinne. Oswald avait un mélange d’inquiétude et de plaisir à l’approche de ce nouveau succès ; il en jouissait par avance ; mais par avance aussi il était jaloux, non de tel homme en particulier, mais du public, témoin des talens de celle qu’il aimait ; il eût voulu connaître seul ce qu’elle avait d’esprit et de charmes ; il eût voulu que Corinne, timide et réservée comme une Anglaise, possédât cependant pour lui seul son éloquence et son génie. Quelque distingué que soit un homme, peut-être ne jouit-il jamais sans mélange de la supériorité d’une femme ; s’il l’aime, son cœur s’en inquiète ; s’il ne l’aime pas, son amour-propre s’en offense. Oswald près de Corinne était plus enivré qu’heureux, et l’admiration qu’elle lui inspirait augmentait son amour, sans