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CORINNE OU L’ITALIE

en Italie, que l’on y aurait plus tort que partout ailleurs en renonçant à ses beautés. Alfieri qui, quand il le voulait, excellait dans tous les genres, a fait dans son Saül un superbe usage de la poésie lyrique ; et l’on pourrait y introduire heureusement la musique elle-même, non pas pour mêler le chant aux paroles, mais pour calmer les transports furieux de Saül par la harpe de David. Nous possédons une musique si délicieuse, que ce plaisir peut rendre indolent sur les jouissances de l’esprit. Loin donc de vouloir les séparer, il faudrait chercher à les réunir, non en faisant chanter les héros, ce qui détruit toute dignité dramatique, mais en introduisant ou des chœurs, comme les anciens, ou des effets de musique, qui se lient à la situation par des combinaisons naturelles, comme cela arrive si souvent dans la vie. Loin de diminuer sur le théâtre italien les plaisirs de l’imagination, il me semble qu’il faudrait au contraire les augmenter et les multiplier de toutes les manières. Le goût vif des Italiens pour la musique, et pour les ballets à grand spectacle, est un indice de la puissance de leur imagination et de la nécessité de l’intéresser toujours, même en traitant les objets sérieux, au lieu de les rendre