Page:De Staël - Corinne ou l'Italie, Tome I, 1807.djvu/207

Cette page a été validée par deux contributeurs.
203
CORINNE OU L’ITALIE

siste telle que vous l’entendez en Angleterre ; mais on y jouit d’une parfaite indépendance sociale. — C’est-à-dire, reprit Oswald, qu’on n’y montre aucun respect pour les mœurs. — Au moins, interrompit Corinne, aucune hypocrisie. M. de La Rochefoucault a dit : Le moindre des défauts d’une femme galante est de l’être. En effet, quels que soient les torts des femmes en Italie, elles n’ont pas recours au mensonge ; et si le mariage n’y est pas assez respecté, c’est du consentement des deux époux.

— Ce n’est point la sincérité qui est la cause de ce genre de franchise, répondit Oswald, mais l’indifférence pour l’opinion publique. En arrivant ici, j’avais une lettre de recommandation pour une princesse ; je la donnai à mon domestique de place pour la porter ; il me dit : Monsieur, dans ce moment cette lettre ne vous servirait à rien car la princesse ne voit personne, elle est INAMORATA ; et cet état d’être INAMORATA se proclamait comme toute autre situation de la vie, et cette publicité n’est point excusée par une passion extraordinaire ; plusieurs attachemens se succèdent ainsi, et sont également connus. Les femmes mettent si peu de mystère à cet égard, qu’elles avouent leurs liaisons avec moins d’embarras que nos