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CORINNE OU L’ITALIE

joie. Le comte d’Erfeuil arriva, tout enchanté d’un bal, d’une assemblée, d’une société nombreuse enfin qui lui rappelait un peu la France. — J’ai fait ce que j’ai pu, dit-il à lord Nelvil, pour trouver quelque intérêt à ces ruines dont on parle tant à Rome. Je ne vois rien de beau dans cela ; c’est un préjugé, que l’admiration de ces débris couverts de ronces. J’en dirai mon avis quand je reviendrai à Paris ; car il est temps que ce prestige de l’Italie finisse. Il n’y a pas un monument en Europe, subsistant aujourd’hui dans son entier, qui ne vaille mieux que ces tronçons de colonne, que ces bas-reliefs noircis par le temps, qu’on ne peut admirer qu’à force d’érudition. Un plaisir qu’il faut acheter par tant d’études ne me paraît pas bien vif en lui-même ; car, pour être ravi par l’Opéra de Paris, personne n’a besoin de pâlir sur les livres. — Lord Nelvil ne répondit rien. Le comte d’Erfeuil l’interrogea de nouveau sur l’impression que Rome avait produite sur lui. — Au milieu d’un bal, dit Oswald, ce n’est pas trop le moment d’en parler d’une manière sérieuse ; et vous savez que je ne sais pas parler autrement. — À la bonne heure, reprit le comte d’Erfeuil : Je suis plus gai que vous, j’en conviens ; mais qui sait si je ne suis pas plus