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CORINNE OU L’ITALIE

mais moins admirable, il faut en convenir, quand elle s’étendait à d’autres sujets.

— Je vous ai beaucoup d’obligation, milord, dit le comte d’Erfeuil, de me tirer de cette Allemagne où je m’ennuyais à périr. — Vous y êtes cependant, répondit lord Nelvil, généralement aimé et considéré. — J’y ai des amis, reprit le comte d’Erfeuil, que je regrette sincèrement ; car dans ce pays-ci l’on ne rencontre que les meilleures gens du monde ; mais je ne sais pas un mot d’allemand, et vous conviendrez que ce serait un peu long et un peu fatigant pour moi de l’apprendre. Depuis que j’ai eu le malheur de perdre mon oncle, je ne sais que faire de mon temps ; quand il fallait m’occuper de lui, cela remplissait ma journée, à présent les vingt-quatre heures me pèsent beaucoup. — La délicatesse avec laquelle vous vous êtes conduit pour monsieur votre oncle, dit lord Nelvil, inspire pour vous, M. le comte, la plus profonde estime. — Je n’ai fait que mon devoir, reprit le comte d’Erfeuil, le pauvre homme m’avait comblé de biens pendant mon enfance ; je ne l’aurais jamais quitté, eût-il vécu cent ans ! mais c’est heureux pour lui d’être mort, ce le serait aussi pour moi, ajouta-t-il en riant, car je n’ai pas grand espoir dans ce monde. J’ai fait