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CORINNE OU L’ITALIE

ainsi sous les tombeaux. Mais cet asile des Chrétiens persécutés a quelque chose de si sombre et de si terrible, que je ne puis me résoudre à y retourner ; ce n’est pas cette mélancolie touchante que l’on respire dans les lieux ouverts, c’est le cachot près du sépulcre, c’est le supplice de la vie à côté des horreurs de la mort. Sans doute on se sent pénétré d’admiration pour les hommes qui, par la seule puissance de l’enthousiasme, ont pu supporter cette vie souterraine, et se sont ainsi séparés entièrement du soleil et de la nature ; mais l’ame est si mal à l’aise dans ce lieu, qu’il n’en peut résulter aucun bien pour elle. L’homme est une partie de la création, il faut qu’il trouve son harmonie morale dans l’ensemble de l’univers, dans l’ordre habituel de la destinée ; et de certaines exceptions violentes et redoutables peuvent étonner la pensée, mais effraient tellement l’imagination, que la disposition habituelle de l’ame ne saurait y gagner. Allons plutôt, continua Corinne, voir la pyramide de Cestius ; les protestans qui meurent ici sont tous ensevelis autour de cette pyramide, et c’est un doux asile, tolérant et libéral. — Oui, répondit Oswald, c’est là que plusieurs de mes compatriotes ont trouvé leur dernier séjour. Allons-y ; peut-être est-ce ainsi