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CORINNE OU L’ITALIE

quelques temples de brique qui subsistent encore. C’est seulement après la conquête de la Sicile que les Romains firent usage, pour la première fois, du marbre pour leurs monumens ; mais il suffit de voir les lieux où de grandes actions se sont passées pour éprouver une émotion indéfinissable. C’est à cette disposition de l’ame qu’on doit attribuer la puissance religieuse des pélerinages. Les pays célèbres en tout genre, alors même qu’ils sont dépouillés de leurs grands hommes et de leurs monumens, exercent beaucoup de pouvoir sur l’imagination. Ce qui frappait les regards n’existe plus, mais le charme du souvenir y est resté.

On ne voit plus sur le Forum aucune trace de cette fameuse tribune d’où le peuple romain était gouverné par l’éloquence ; on y trouve encore trois colonnes d’un temple élevé par Auguste en l’honneur de Jupiter Tonnant, lorsque la foudre tomba près de lui sans le frapper ; un arc à Septime Sévère que le sénat lui éleva pour récompense de ses exploits. Les noms de ses deux fils, Caracalla et Géta, étaient inscrits sur le fronton de l’arc ; mais lorsque Caracalla eut assassiné Géta, il fit ôter son nom, et l’on voit encore la trace des lettres enlevées. Plus loin est un temple à Faustine, monument de la