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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

certes, à cet égard, leurs plaintes étoient naturelles. Mais il falloit venir à leur secours sans porter atteinte en aucune manière à la vente des propriétés nationales, et leur faire comprendre ce que les protestans avoient compris sous Henri IV ; c’est que, bien qu’ils eussent été les amis et les défenseurs de leur roi, ils devoient consentir, pour le bien de l’état, à ce que le monarque adoptât les intérêts dominans dans le pays sur lequel il vouloit régner. Mais les émigrés ne conçoivent jamais qu’il y a des François en France, et que ces François doivent compter pour quelque chose, voire même pour beaucoup.

Le clergé redemandoit son ancienne existence, comme si cinq millions de propriétaires dans un pays pouvoient être dépossédés, quand même leurs titres de propriété ne seroient pas consacrés maintenant par toutes les lois ecclésiastiques et civiles. Certainement la France, sous Bonaparte, a presque autant perdu sous le rapport de la religion qu’en fait de lumières. Mais est-il nécessaire que le clergé soit un corps politique dans l’état, et qu’il possède des richesses territoriales, pour que le peuple françois reprenne des sentimens plus religieux ? D’ailleurs, lorsque le clergé catholique exerçoit un